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NanOQTech, projet de recherche sur les dispositifs quantiques, lauréat des Etoiles de l'Europe 2020

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Le projet NanOQTech (Nanoscale Systems for Optical Quantum Technologies), porté par Philippe Goldner est l'un des douze projets lauréats de la 8e édition des Etoiles de l'Europe.

A cette occasion, nous republions l'interview de Philippe Goldner et Diana Serrano (Chimie Paris - PSL) réalisée en juillet 2018.

     Mesure par des techniques optiques des propriétés de spin nucléaire dans des nanoparticules dopées de terres rares.                                                    © 2018 Diana Serrano - Chimie ParisTech - Université PSL

Mise à jour : 

Le 16 décembre 2020, la 8e cérémonie des Étoiles de l'Europe a récompensé douze projets scientifiques français participant au programme-cadre Horizon 2020. Parmi eux, l'Université PSL est fière de compter le projet NanOQTech (Nanoscale Systems for Optical Quantum Technologies), porté par Philippe Goldner chercheur CNRS à l’Institut de Recherche de Chimie Paris (Chimie ParisTech - PSL). Ce projet avait reçu en 2015 l'aide de PSL pour la réponse à l'appel du programme Horizon 2020 : FET OPEN.

 

 

  • Philippe Goldner est chercheur à l’Institut de Recherche de Chimie Paris, responsable du groupe Cristaux et Dynamique des Etats Quantiques. Il est également coordinateur du projet européen NanOQTech.
  • Diana Serrano est chercheuse à l’Institut de Recherche de Chimie Paris au sein du groupe Cristaux et Dynamique des Etats Quantiques, elle est également manager du projet européen NanOQTech.

PSL : Pouvez-vous en dire un peu plus sur le projet NanOQTech (Nanoscale Systems for Optical Quantum Technologies) ?

Philippe Goldner : NanOQTech est un projet financé par le FET Open, un sous-programme de Horizon 2020 très compétitif. Il sélectionne des projets de recherche, « visionnaires, interdisciplinaires, rapprochant la science et l'ingénierie pour transformer l'excellence scientifique de l'Europe en avantage compétitif ». Le projet rassemble huit laboratoires, dont nos collègues du Syrte de l’Observatoire de Paris - PSL, mais aussi des chercheurs de l'Institut Néel à Grenoble, l’Université de Lund, l’Université d’Aarhus, le Karlsruher Institut für Technologie, l’Institute of Photonic Sciences de Barcelone et un partenaire industriel : Keysight Technologies. J’en assure la coordination et Diana le management. L’objectif global du projet est de démontrer l’intérêt de matériaux nanométriques dopés par des terres rares pour les technologies quantiques, et, particulièrement, pour celles qui mettent en jeu la lumière.


Diana Serrano : Il faut avoir à l’esprit que l’amélioration de nos ordinateurs ou moyens de communication passera (et passe déjà) par les technologies quantiques. Or, s’il est prouvé que les systèmes nanométriques contrôlés par la lumière apportent des fonctionnalités clés aux technologies quantiques de communication, de calcul et de détection, le principal défi auquel nous faisons face est de conserver au maximum la durée de vie des états quantiques à cette échelle. Les terres rares, insérées dans des nanoparticules, nous semblent offrir des propriétés très intéressantes dans ce domaine.

 

 

PSL : NanOQTech est un projet sur 3 ans. Vous venez de publier, à mi-parcours du projet, un article dans la revue Nature Communications présentant vos derniers résultats. Quelle est leur importance pour vos travaux de recherche et pour la suite du projet ?

Nous sommes partenaires de deux nouveaux projets (SQUARE et ASTERIQS) retenus dans le cadre du programme européen Flagship on Quantum Technologies doté d'un budget d’1 milliard d’€.

DS : Pour être tout à fait exact, cette publication, dans Nature Communications suit des travaux que nous avions publiés l’an passé dans Nano Letters. Il s’agit néanmoins d'une avancée importante à la fois dans le domaine et vers nos objectifs initiaux. C’est une satisfaction d’autant plus grande que pour ce genre de projet, nous nous efforçons d’avoir des objectifs ambitieux.  
Comme l’a dit Philippe, notre hypothèse de départ était que les spins des terres rares dans les nanoparticules avaient de bonnes propriétés, mais nous n’étions pas tout à fait sûrs de savoir comment les mesurer. Finalement, nous avons pu mettre au point une technique de mesure originale qui a démontré que l’on peut, de manière assez satisfaisante, transposer les propriétés quantiques de cristaux de taille millimétrique aux nanoparticules. Cette réduction d’échelle permettra de grandement faciliter l’intégration de ces matériaux dans des dispositifs de micro- et nano-photonique et en ce sens ces résultats sont très porteurs. Ils nous ont permis de déposer, en tant que partenaires, deux nouveaux projets dans le cadre du programme européen Flagship on Quantum Technologies pour un budget d’un milliard d’euros. Ces projets, SQUARE et ASTERIQS, viennent d’être retenus.

 

 

PSL : C’est une recherche très amont mais dont vous envisagez déjà les principales applications. Quelles seraient-elles ?

Un FET OPEN, ça n’arrive pas tous les jours, quand on a soumis notre dossier 11 projets ont été retenus sur 800 soumis, soit un taux de réussite de moins de 2%. Un consortium très soudé et qui se connait bien est un grand avantage pour réussir. 

PG : Il y a tout d'abord l’utilisation de nanoparticules dopées par des terres rares comme composants de futurs ordinateurs quantiques. Nos recherches contribueraient ainsi au développement d’outils de simulations et de calculs inaccessibles aux ordinateurs actuels. Nous envisageons également des applications dans le domaine de la communication quantique et plus particulièrement dans la transmission de données sécurisées. Ceci pourrait se faire dans des fibres optiques, couramment utilisées pour transmettre de grande quantité d’informations, couplées à des nanoparticules dopées par des terres rares qui joueraient le rôle de mémoire pour l'information quantique. Des flux de communication quantique sécurisés à grande distance pourraient alors être établis. C'est un domaine très actif : un satellite chinois a été lancé par exemple pour établir des communications quantiques. Ce n’est que le début.


DS : Dans le cadre du projet NanOQTech, nous explorons aussi l'utilisation de nanostructures dopées par des terres rares pour de nouveaux capteurs de forces ou des sources de photons uniques. On travaille également sur des couplages entre terres rares et graphène. Ce dernier aspect offrirait de nouvelles fonctionnalités en opto-électronique.

 

PSL :  Le programme FET OPEN est extrêmement sélectif. Comment avez-vous construit votre dossier de candidature et quels seraient vos conseils aux futurs porteurs de projets ?  

Les projets européens sont une très belle opportunité pour la visibilité de la discipline, la constitution de réseaux scientifiques et l’avancement des carrières. Le recours au pôle Europe de nos établissements est une très bonne façon de gagner du temps et de maximiser les chances de succès.

PG : Il faut s’armer de patience, nous avons d'ailleurs proposé le projet à deux reprises. Loin d’être décourageant c’est une très bonne chose car chaque projet bénéficie d’un rapport détaillé des évaluateurs. Leurs retours sont utiles et intéressants pour enrichir et préciser le projet. Nous avons également pu bénéficier d’une aide de PSL, et de celle d’un expert en montage de projets européens. Si j’avais un conseil, ce serait de contacter les responsables Europe de vos établissements ! Les projets européens sont une très belle opportunité, pour la visibilité de la discipline, la constitution de réseaux scientifiques, et l’avancement des carrières, mais leur écriture fait appel à un langage spécifique et parfois un peu obscur. Le recours à des experts, comme le pôle Europe au sein de nos établissements, est un véritable gain de temps et permet de maximiser les chances de succès.
Participer à des projets en tant que partenaire avant de se lancer dans la coordination est aussi une très bonne expérience. J’ai beaucoup puisé dans mes projets précédents pour assurer la rédaction et maintenant coordination de NanOQTech. Ces expériences m’ont permis d’anticiper les étapes, et surtout de bénéficier d’un solide réseau de collaborateurs. La coordination n’est pas une mince affaire, et, travailler avec des partenaires que l'on connaît bien, simplifie énormément le travail. Un FET OPEN, ça n’arrive pas tous les jours, quand on a soumis notre dossier 11 projets ont été retenus sur 800 soumis, soit un taux de réussite de moins de 2% ! Le budget du projet est de 3.4 M€ dont 700k€ environ pour notre équipe. Un consortium très soudé et qui se connait bien est un grand avantage pour réussir.  

L'équipe du projet NanOQTech dans le hall de Chimie Paris Tech ©Philippe Goldner